LA POÉSIE
Il avance sous la lumière pâle du matin, silhouette bleue fondue dans la ville. Son pas est discret, régulier, presque mécanique. Il ne parle pas, mais il porte des mots. Des mots qu’il ne lira jamais, des histoires qu’il transporte sans les connaître.
Cette veste est une réminiscence du facteur, de ceux qui traversent le monde sans y laisser de trace, sinon l’empreinte fugace d’une lettre glissée sous une porte. Elle s’inspire des uniformes modestes et robustes, de ces habits conçus pour être fonctionnels, mais qui finissent par se charger d’une poésie involontaire. Le jean, rude et fidèle, évoque ces travailleurs qui usent leur vêtement comme ils usent leurs journées, à marcher, à livrer, à disparaître dans la routine d’un service qui ne laisse pas de place au hasard.
Mais ici, un détail brise la rigueur de l’ensemble : une planche clouée sur la poitrine, usée, marquée par le temps et l’urgence. Un message qui n’a jamais été délivré, un fragment de mur arraché à une ville anonyme, une correspondance figée. Les lettres y sont griffées comme un souvenir, une trace de passage, un panneau indicateur dont la destination s’est effacée.
Inspirée par les portraits du facteur Roulin de Van Gogh, cette veste est une ode à ces figures invisibles qui relient les autres sans jamais se raconter. Elle porte la mémoire des plis oubliés, des courriers jamais ouverts, des nouvelles qui arrivent trop tard ou qui n’ont jamais eu de destinataire.
Un habit d’attente, une enveloppe sans expéditeur, un uniforme pour ceux qui avancent sans bruit.











